L’hypersensible qui s’ignore souffre principalement de 2 choses :
- Du jugement extérieur permanent, qui lui explique combien il est trop ou pas assez…
- Et de ce qu’il est
Car la première « victime » de l’hypersensibilité, c’est l’hypersensible qui s’ignore. J’insiste sur cette condition, car normalement la prise de conscience et la connaissance de notre hypersensibilité sont censées nous permettre de changer ces 2 sources de souffrance.
Donc quand on ignore être hypersensible et que l’on n’a pas appris à gérer nos émotions, nous sommes soumis à des émotions violentes. Un jour nous pourrons parler d’émotions intenses, mais pour l’enfant qui s’ignore être hypersensible, je pense que la notion de violence n’est pas exagérée. C’est à la mesure de la disproportion émitionnelle.
La nature des émotions
Précisons qu’une émotion n’est pas psychique, elle n’est pas de l’ordre de l’esprit. Une émotion est de l’ordre du physique, rappelons-le. Une émotion est un phénomène physique, biologique et chimique. Notre cerveau émotionnel est situé dans le ventre, c’est lui qui gère les ordres hormonaux et qui va influer sur tout le processus physique ; joie = euphorie et excitation, peine = tension et larmes, colère = libération d’énergie et besoin d’agir, peur = stress et sueur etc…
Vivre des tsunamis émotionnels
Donc quand un enfant hypersensible se prend une décharge hormonale disproportionnée et qu’il y réagit intensément, il est la 1ère victime de lui-même, il se subit. Il ne sait pas que le tsunami émotionnel qu’il vit est anormal (au sens que la norme ne fonctionne pas comme ça). Il grandit avec ses décharges émotionnelles violentes, il fait avec, comme il peut. Et de sa fenêtre, ça s’arrête là. Il ne sait pas que c’est disproportionné, il ne sait pas que c’est différent chez la majorité des autres personnes. Il est juste lui, comme ça, dans un environnement qui le soutiendra ou qui le brimera.
La méconnaissance ou désinformation…
Le grand malheur est que l’hypersensibilité n’est pas une maladie qu’on diagnostique ; ni à la naissance, ni jamais, ce n’est pas une maladie… Donc dans la majorité des cas, la famille est ignorante, quand bien même l’un des parents ou les 2 seraient hypersensibles. Car la difficulté de ce sujet c’est qu’il faut le connaître, pour savoir quoi en faire. Or l’ignorance règne.
Même de nos jours, le terme se démocratise, mais quand on voit tout ce qu’on raconte dessus, bah… Y a de quoi se demander si c’est réellement informatif et surtout aidant…
Le bulldozer normatif
Donc un enfant qui pleure pour un « rien », peut se voir dire qu’il doit arrêter de pleurer, qu’il ne faut pas pleurer pour un rien, que pleurer ne sert à rien, qu’il est trop sensible etc…
Si l’enfant se met en colère pour un « rien », il va être catalogué de colérique, voire d’hyperactif avec impulsivité ; en tout cas il sera susceptible d’être violent, agressif et d’avoir des comportements inadaptés envers les autres.
Quand l’enfant a peur de tout, de timide/réservé à complètement introverti et asociale, il peut développer des comportements phobiques.
Et j’en passe sur les situations stressantes, menant aux crises d’angoisses et aux comportements inhabituels ou déviants, comme quand un enfant ne veut plus dormir dans son lit, ou refait pipi au lit des années après avoir été propre etc…
C’est tellement facile à dire : « n’aie pas peur, ne pleure pas, ne crie pas, ne stresse pas etc… » Mais c’est tellement décorrélé de ce que vit l’autre. En fait c’est un manque total d’empathie.
L’enfant dépend du regard extérieur
Un enfant n’a pas la conscience, ni même la capacité à être conscient de sa spécificité. Il ne se voit qu’à travers le regard extérieur ; et en particulier à travers le regard des proches, de ceux qu’il voit régulièrement et qui peuvent lui répéter régulièrement les mêmes mots (maux).
Si l’environnement lui renvoie des éléments accueillants, positifs, constructifs de ce qu’il est dans sa sensibilité, il pourra grandir au moins en s’acceptant tel qu’il est. Il ne comprendra pas encore, il ne saura pas encore le pourquoi du comment, mais disons qu’il aura une base saine et « solide » pour évoluer positivement.
Pas d’émotions dans l’espace publique
Mais malheureusement, je le répète, ce sujet est souvent mal connu, notre société est majoritairement intolérante à tout ce qui diffère, il faut irrémédiablement entrer dans le moule. Et donc généralement la société broie les hypersensibles. La société n’aime déjà pas les émotions en société, mais quand en plus il s’agit d’émotions fortes, d’émotions intenses, alors là c’est le pompon ! C’est inacceptable, c’est intolérable, c’est insupportable ! Les émotions n’ont pas leur place dans l’espace publique !
Du trop au très sensible…
La connaissance et la compréhension de notre hypersensibilité permet de transformer le trop en très. Enfant, c’est l’autre qui nous définissait comme TROP sensible. Si par chance, on peut compter dessus, on prend conscience un jour d’être hypersensible ; et mieux encore si un jour on s’intéresse à notre hypersensibilité pour la comprendre et la sublimer. Alors ce jour-là ce n’est plus l’autre qui dira en quoi nous sommes trop ou pas assez… Mais nous qui pourrons dire, « je suis très sensible, c’est vrai, parce que je suis… parce que je fonctionne de cette façon… ».
- Non, je ne suis pas soupe au lait, je suis hypersensible à….
- Non, je ne suis pas lunatique, je suis hypersensible à…
- Non, je ne suis pas écorchée vive, je suis hypersensible à…
- Non, je ne suis pas trop sensible, je suis très sensible à….
- Oui, je peux démarrer au quart de tour, parce que ça touche une corde sensible…
- Oui, je suis facilement émue et je pleure facilement….
- Oui, je suis empathique et je comprends facilement ce que tu ressens…
- Oui je suis compatissante et quand tu souffres, je souffre avec toi…
- Oui je suis hypersensible, et je suis facilement touchée par ce que je sens, par ce que je vois, par ce que j’entends…
- Oui je suis hypersensible et tout me traverse, et parfois tout ce que je ressens, c’est trop pour moi…
Je suis hypersensible et il n’y a pas de bouton On/Off, ni de bouton Plus/Moins pour ajuster mes émotions.
Conscience et Gestion émotionnelle
Parce que j’ai pris conscience de mon hypersensibilité, j’ai appris à gérer mes émotions. Et mes émotions peuvent encore être très fortes, mais grâce à la gestion émotionnelle, je trouve que je sais davantage m’accueillir. Grâce à cet accueil, je n’ai plus besoin d’exploser à l’extérieur, parce que je sais laisser circuler à l’intérieur. Je pense que l’intensité émotionnelle est toujours aussi importante, mais elle se manifeste différemment et moi, surtout, je la vie différemment.
De l’intérieur vers l’extérieur…
Et tout changement intérieur rayonne vers l’extérieur. Est-ce que je suis toujours intense ? Oui, bien sûr. Mais je pense que l’intensité émotionnelle qui transpire naturellement de moi, est plus douce, plus lente et contenue. Je ne me vois pas et je ne me vis pas comme un barrage prêt à céder. Ce n’est pas contenu en sens-là. Mais c’est contenu, comme un contenant, comme un maintien, une maitrise.
Des fois, je manque de maitrise, et des fois ça fait schplouff parce que dompter un tsunami c’est galère. Et puis je ne supporte plus les « Tu devrais… Tu te prends la tête pour rien… Tu te mets la tête à l’envers pour rien… ».
Toute ma vie, les autres ont jugé mes états émotionnels, sans jamais se demander s’ils auraient supporter le quart de ce que je vis. Alors forcément, s’il y a bien une chose qui me met encore hors de moi, je l’admets volontiers, c’est quand l’autre se permet son jugement, sa recette, quand pas une seule fois, il n’a été confronté à ces décharges émotionnelles, tellement puissantes.
Reconnaissance et Transformation
Reconnaître notre hypersensibilité, voir de quelle façon elle se manifeste et s’exprime à travers soi, est le point de départ pour l’amadouer, pour la transformer. On ne change pas ce qu’on est, on ne devient pas moins sensible en termes de sensibilité émotionnelle. On peut apprendre à la diriger différemment, à la vivre différemment.
Assumer / S’assumer
On n’est pas des machines, et il y aura des moments où il sera difficile de se maitriser. Mais cela se résume à assumer. Quand j’explose et cela m’arrive encore occasionnellement, et bien je trouve cela très salvateur. Non seulement par honnêteté avec moi-même, mais parce c’est bon de ne pas faire d’efforts ! Mais il faut que cela soit fait dans le respect de soi-même et de la situation.
La Tempête ou le Calme avant la tempête…
Car la principale raison qui m’a fait entamer cet apprentissage de la gestion émotionnelle, c’est que j’en avais marre de tout détruire sur mon passage, tel un tsunami ambulant.
L’explosion émotionnelle continuelle est assez incompatible avec les relations aux autres. On ne peut pas passer notre temps à déverser nos états d’âmes sur les autres. Ou du moins, moi j’ai considéré que je ne souhaitais pas poursuivre sur ce chemin. Que ce chemin ne m’apportait pas ce que je souhaitais. C’est en partie ce qui m’a motivée, il y a des années maintenant à vivre autrement.
Rien ne change sans effort
Mais je ne vous mentirai pas, savoir maitriser un débordement parfaitement naturel, demande des efforts. Personnellement, j’y trouve mon compte parce que ces efforts, je les fais pour moi, pour ce qu’ils m’apportent et non pour ce qu’ils me coutent. Et choisir de ne pas en faire, quand je m’autorise à me lâcher, est ma façon d’avoir une soupape de décompression et donc de ne pas être dans l’accumulation. Mais ç’est à chacun de jauger ce qu’il souhaite et ce qui lui correspond.
En cela nous avons le droit et le choix à la différence, à partir de soi et non à partir d’une quelconque règle…
Bien vivre son hypersensibilité
En tout cas, je voulais vous dire qu’il est possible de bien vivre son hypersensibilité avec à mon sens ces 3 éléments :
- Accepter / S’assumer
- Être conscient de Soi / Se voir
- Transformer / Sublimer
