Sensible n’est pas Fragile

L’idée qu’être sensible, c’est être fragile, est largement répandue. Pourtant rien dans la définition ne le fait supposer.

 

Définition de sensible

 

1. Capable de sensation et de perception, qui est ou peut être perçu par les sens, qui éprouve des émotions et des sentiments. => En gros, c’est ce qui fait qu’on est humain ou vivant.

 

2. Qui est très facilement affecté par la moindre action ou agression extérieure.

 

Ex : Être sensible de la gorge. Une dent sensible au froid.

=> J’aimerais bien que « la moindre action ou agression extérieure » soit définie parce que face à une agression extérieure (petite ou grosse) est-ce être sensible ? ou est-ce être réceptif, ou attentif, ou non indifférent à un événement quel qu’il soit ?

 

Point 2 à méditer, ça se discute à mon avis ; ça se dit sans aucun doute mais est-ce juste ou le reflet d’une quelconque réalité ? Je ne suis pas convaincue.

 

3. Se dit d’une partie du corps que l’on ressent, qui est plus ou moins douloureuse.

 

Ex : La douleur est moins vive, mais la zone est toujours sensible.

=> Ici on associe sensible et douloureux. Être sensible physiquement c’est sentir des sensations, alors que la douleur c’est sentir une sensation de mal. Dans un cas les sensations sont neutres sans connotation négative, alors que la douleur est clairement connotée négativement. Avoir la peau sensible ne signifie pas qu’elle fait mal et que c’est douloureux. Dans le cas de la dent sensible au froid, est-ce la sensibilité de la dent qui fait que le froid est gênant, ou est-ce le froid qui rend la dent sensible ? Point 2 ou point 3 de la définition ? Qui de l’œuf ou de la poule naît en premier ?

 

La définition de fragile (pour une personne) est : 

Qui est de faible constitution​qui a peu de résistances physiques ou psychologiques (morales). Ex : Être fragile des bronches.​

 

Pour les objets : Qui se brise facilement (le verre est très fragile) ; Qu’on peut endommager facilement, qui n’est pas solide, pas résistant (Mécanisme fragile).

 

Mon sentiment est que la définition de fragile pour les personnes, sur l’aspect physique est très proches du point 2 de la définition de sensible, ainsi on pourrait associer clairement la notion de fragilité à la sensibilité physique, bien que cela soit valable dans des cas relativement spécifiques (être sensible de la gorge, être fragile des bronches).

 

Mais lorsqu’on assimile sensible à fragile dans le langage courant s’agit-il du plan physique ?

 

Sensible exprime clairement ce qui attrait au domaine des sensations, de la perception sensorielle, basée sur les sens, les sens étant physique, c’est un fait. Même nos émotions sont physiques, on ressent de la joie, de la peine, de la colère, parce que dans notre corps sont libérées des hormones, qui nous font nous sentir dans un certain état, qui impacte la vitesse des battements de notre cœur, qui accélère ou ralentit la circulation sanguine et l’oxygénation, impactant par voie de conséquence notre respiration, et pouvant influencer des symptômes physiques tels que la sueur, la sensation de nausée, voire de ventre noué etc…

 

Alors que dans la définition de fragile pour les personnes, on ne parle pas de sensibilité mais de résistances physiques ou psychologiques.

 

Et la définition de résister dit :

 

  • S’opposer par la force à celui ou à ceux qui emploient des moyens violents : Résister à un agresseur, à un assaut.
  • S’opposer à quelqu’un, à sa volonté : Résister aux pressions de l’opinion publique.
  • S’opposer à une force armée d’occupation, et en particulier, participer à la Résistance pendant la Seconde Guerre mondiale.
  • Lutter pour ne pas succomber à ce qui attire, séduit : Il a résisté à des offres alléchantes.
  • Supporter victorieusement des épreuves physiques ou morales : Pouvoir résister à la fatigue.
  • Ne pas être atteint par les effets des actions auxquelles quelque chose est soumis : Argumentation qui ne résiste pas à l’analyse.
  • Opposer une résistance : Il y a quelque chose qui résiste dans la serrure.

 

Alors je ne sais pas à quoi sommes-nous censés nous opposer physiquement pour être résistant, ou du moins ne pas être fragile, mais pour ce qui est de la résistance psychologique, j’en ai une petite idée…

 

Je crois aussi que la définition de fragile pour les objets est appliqué régulièrement aux personnes. Parce que briser quelqu’un physiquement c’est vouloir le tuer, mais briser quelqu’un psychologiquement c’est quelque chose qui se pratique largement. La maltraitance morale est difficile à prouver, elle n’est pas forcément voyante, elle peut être très insidieuse au sein des familles, des couples, des entreprises. Et d’ailleurs je ne suis pas sûre que souffrir de maltraitances morales soit être fragile ou sensible, dans la mesure où la maltraitance morale répétée n’est pas une « moindre action ou agression extérieure » et qu’elle n’exige en rien d’y être résistant. Puisque plus on résiste, plus la situation dure, moins on est résistant, plus on réagira et on alertera tôt, ce qui permettra de trouver une issue plus rapidement que si on résiste.

 

Maintenant si l’on souffre psychologiquement, en dehors d’un cas de maltraitance morale, et que l’on est sensible/fragile lors de situations banales du quotidien, alors dans ce cas, je ne parlerais pas de fragilité psychologique mais d’ignorance et d’incompétence. L’esprit tout comme le corps se forge, se muscle, se développe (ou non). Si les enfants ne se musclaient pas physiquement, ils ne marcheraient pas, ça sert à ça de les laisser crapahuter au sol, de les laisser s’accrocher à nous, aux choses, ils se musclent, pour un jour pouvoir supporter leur poids à la verticale et marcher. Moins vous laisser un enfant bouger, moins il se muscle et plus tard il marchera. La construction psychologique c’est un peu pareil, soit on exerce le cerveau à voir, écouter, comprendre, questionner, rechercher, discerner etc… Soit on lui dit : « ne pense pas, ne parle pas, ne questionne pas, ne cherche pas à comprendre » etc… Il y a donc une façon d’éduquer qui arme les enfants pour se défendre dans la vie, et il y a une façon de les endormir pour qu’ils se soumettent. Si l’intérêt des parents à avoir des enfants soumis semble assez évident (avoir la paix) l’inconvénient est qu’ils deviendront des adultes soumis et non armés pour se défendre. Ils seront des proies et en proie à l’environnement, ne sachant l’écouter, le comprendre et en jouer. Les personnes ne sont pas fragiles psychologiquement parce qu’elles le sont, comme le serait une limite (voire une déficience) mais parce qu’on leur a appris à l’être. Et ce qui a été appris peut être désappris et remplacé par un nouveau savoir, de nouvelles habitudes, et aptitudes.

 

Alors je ne sais pas si on est (naît) fragile, ou « non résistant », par nature, ou par manque d’entrainement. La définition parle de faible constitution, Ça aussi faudrait qu’on m’explique. Inné, acquis, déterminisme, fatalité ? Combien de gens ont sublimé les enfants qu’ils étaient, non pas en niant un éventuel point faible, mais en développant leur talent ailleurs. On n’a pas toujours le physique, ou la capacité intellectuelle dans un domaine qu’on souhaiterait, mais il arrive qu’on l’est dans un autre, et que ce chemin qu’on imaginait pas, ne soit pas plus mal, voire même bien meilleur, mais ce n’est pas celui qu’on envisageait au départ.

 

Je maintiens donc que Sensible n’est pas Fragile ! Et que seule la fragilité physique peut supposer une « forme de sensibilité »… Quand on ne parle clairement pas de sensibilité psychologique, mais d’éventuelles fragilités psychologiques. Où là encore je pense qu’il est nécessaire de remettre les choses à leur place et dans leur contexte, puisque quelqu’un qui vivrait un accident grave, un attentat, un viol, ou toute autre agression violente, et qui serait affectée par cet événement, ne serait pas de mon point de vue quelqu’un de fragile ou de sensible, mais quelqu’un de fragiliser parce que vivre ce type de choses est dur, inhabituel et choquant. Et donc c’est normal d’être affecté, c’est normal d’avoir besoin de temps pour s’en remettre, et ce ne serait pas être sensible ou fragile, mais Humain !

 

Que l’agression soit fondée et réelle objectivement, ou uniquement ressentie, perçue et jugée subjectivement comme telle, elle produira les mêmes effets et conséquences sur la personne.

 

Il est donc normal d’être affecté dans le cas réel. Dans le cas de la subjectivité personnelle, il appartiendra à la personne de prendre conscience ou non, de vivre à travers ses filtres, dans son monde, dans sa bulle, plutôt que dans le monde réel ; Et il lui appartiendra donc de rester dans son monde et de cultiver son « malheur » ou d’en sortir pour rejoindre les autres et cultiver un autre chemin. Tout est question de choix, aussi durs puissent-ils être parfois !

 

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