Les distorsions cognitives

d'Aaron Beck et David Burns

Les distorsions cognitives que vous allez découvrir peuvent être présentes en différentes quantité et intensité chez chacun d’entre nous. Exprimées de façon éparse et à moindre intensité, elles sont une composante de la vie courante et une résultante de notre expérience. Si vous observez qu’elles sont intenses et multiples, elles peuvent être les symptômes d’une dépression sous-jacente ; et dans ce cas, je vous encourage à ne pas les ignorer afin de prendre les mesures nécessaires à leurs soins.

La cognition

Cognition vient du latin « cognito » signifiant : pensée.

La cognition correspond à l’ensemble des connaissances, croyances et représentations mentales d’une personne ; Plus largement, cela inclut également les mécanismes par lesquels cette personne acquiert l’information (démarches d’apprentissage), la traite, la conserve et l’exploite. Les cognitions sont liées à la perception, à l’éducation, à l’apprentissage, à la mémoire, à l’intelligence, à la fonction symbolique et au langage.

En résumé, nos cognitions sont nos croyances et nos pensées.

 

Les distorsions cognitives

Les cognitions étant par nature plus ou moins subjectives, elles peuvent conduire une personne à une vision approximative, déformée, voire totalement inexacte du monde.

Chez une personne dépressive, les fortes distorsions cognitives sont responsables de son incapacité à évaluer la réalité de manière positive ou neutre, et à faire preuve d’objectivité.

Ces distorsions peuvent concerner des domaines plus ou moins importants de la vie d’une personne.

Aaron Beck a défini la dépression comme étant le résultat de 3 types de distorsions :

Cognition sur soi : « Je ne vaux rien », « Je ne suis pas à la hauteur ».
Cognition sur l’environnement (le monde et les autres) : « Ce monde est pourri », « Les gens sont égoïstes ».
Cognition sur l’avenir : « Rien ne s’améliorera jamais », « C’est sans espoir ».
Si ces expressions sont plus que de simples paroles en l’air (destinées à attirer l’attention), elles peuvent être signes de symptômes dépressifs.

Les 10 pensées dysfonctionnelles types

Les pensées dysfonctionnelles sont des distorsions cognitives très courantes chez les personnes dépressives. Ce sont des façons de penser stériles, souvent stéréotypées, qui s’appliquent de manière quasi-automatique (on parle également de « pensées automatiques »), et amènent le sujet à avoir une vision très sombre du monde.

Voici les 10 pensées dysfonctionnelles les plus répandues (d’après A. Beck & D. Burns)

1- La pensée dichotomique (principe du tout ou rien).

C’est le fait de penser que si une chose n’est pas exactement comme nous le souhaitons, alors il s’agit d’un échec. Il s’agit d’une perte totale des nuances. Ex : « Si je n’ai pas été embauché, c’est que je ne vaux rien », « Si je n’ai pas 20 sur 20 à cet examen, c’est que je suis nul ». Dans ces conditions, avoir 18 sur 20 à un examen, ou n’être « que » le second de sa promotion peuvent être perçus comme des échecs cuisants.

2- La surgénéralisation :

On construit des règles pour son comportement futur à partir de quelques événements négatifs passés. Ex : « Elle n’a pas voulu sortir avec moi ; je vois bien que je n’arriverai jamais à sortir avec une fille ». Avec la surgénéralisation, un seul événement négatif peut influer tout le comportement à venir d’une personne qui se voit alors vouée à l’échec.

On peut distinguer 2 grands types de surgénéralisation :

La surgénéralisation verticale : un échec dans un domaine à un moment donné, et c’est tout le domaine en question (passé, présent et avenir) qui est perçu comme un échec et perdu d’avance. Ex : « Elle ne veut pas sortir avec moi. J’ai toujours tout raté en amour, je serai seul et malheureux toute ma vie ».
La surgénéralisation horizontale : c’est le fait de lier entre eux des problèmes différents, là où ça n’a pas lieux d’être. Un échec dans un domaine va amener la personne à voir des échecs dans tous les domaines. Ex : « J’ai été licencié de mon entreprise, ce n’est pas étonnant, je rate tout ce que je fais dans la vie ».

3- L’abstraction sélective :

C’est un filtre mental qui ne laisse percevoir que le côté négatif des choses. On se focalise sur les détails déplaisants, ce qui nous conduit à voir l’ensemble en négatif. Ex : une personne passe une soirée avec des gens agréables et intéressants, elle s’amuse, elle danse, lorsque quelqu’un renverse du café sur sa chemise. A cause de cet incident, elle en conclut que la soirée est totalement gâchée. Autre exemple : un joueur de tennis gagne lors d’une rencontre sportive, mais au lieu de s’en réjouir, il passe plusieurs jours à ressasser les erreurs qu’il a commises pendant le match et à s’en faire le reproche.

4- La disqualification du positif :

On transforme une expérience neutre ou positive en expérience négative. Ex : on me fait un compliment, j’en déduis que « tout le monde sait que c’est faux, on me dit ça juste pour me faire plaisir », ou encore : « Le soutien des gens qui m’aiment ne compte pas. Ils ne connaissent pas ma vraie nature ». C’est une sorte d’alchimie inversée où l’on transforme de l’or en plomb.

5- Les conclusions hâtives (ou principe de l’inférence arbitraire) :

On imagine des scénarios noirs sans preuve et on y porte crédit. On peut en distinguer 2 sortes :

Les lectures des pensées d’autrui : C’est lorsque l’on croit connaître les pensées des autres en se fiant à de maigres indices. Ex : « Je lui ai laissé un message mais il ne m’a pas rappelé, il ne me considère plus comme son ami », ou bien : « Mon patron m’a regardé de travers, il pense certainement me licencier ».
Les erreurs de voyance : faire des prédictions pessimistes et les considérer comme vraies. Ex : « Je vais devenir folle », « Cette thérapie ne marchera pas, je suis incurable », « Je vais rester seul toute ma vie. »

6- Exagération (dramatisation) et minimalisation :

On exagère ses erreurs et on minimise ses points forts. Exemple d’exagération : « J’ai fait une erreur au travail, tout le monde va le savoir et je serai complètement ridicule aux yeux de tous. » ; Exemple de minimalisation : « J’ai trouvé la solution au problème, mais c’est simplement parce que j’ai eu un coup de chance ».

7- Le raisonnement émotionnel :

C’est se servir de ses sentiments comme s’il s’agissait de preuves. Ex : « Je me sens désespéré, donc mes problèmes doivent être impossibles à résoudre. » ; « Je ne me sens pas de taille à affronter une situation, donc je suis un looser. » ; « Si je me sens dégoûté de ce monde, c’est parce qu’il n’a rien à m’offrir » ; « Si je suis angoissé tout le temps, c’est bien qu’il y a quelque chose qui ne va pas ».

8- Les fausses obligations : Se fixer arbitrairement des buts à atteindre (je dois, je devrais…).

Ex : « Je dois absolument faire le ménage chez moi. ». Résultats : si l’on n’atteint pas ses objectifs, on se sent coupable. On peut également appliquer cette règle pour les autres (on me doit…) : « Après tout ce que j’ai fait pour lui, il pourrait au moins être reconnaissant. » Cela conduit à un sentiment d’amertume, de ressentiment, et à l’idée que l’on est la seule personne à se conduire convenablement.

9- L’étiquetage :

Ce sont des jugements définitifs et émotionnellement chargés que l’on porte sur les autres ou sur soi-même. Ex : « Cette personne est un monstre. » ; dire « Je suis complètement nul » au lieu de dire « J’ai fait une erreur ».

10- La personnalisation :

Se sentir responsable du comportement des autres. Ex : « Si mon fils ne travaille pas à l’école, c’est parce que je suis une mauvaise mère » ; « Ce qui arrive est ma faute ». La personnalisation conduit à un sentiment de culpabilité. C’est l’erreur consistant à penser pouvoir gérer la vie des autres (alors qu’on ne peut que l’influencer).

 

Sources : Thérapie cognitive, Psychomédia

 

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