Le jugement, source de malheur

Le jugement peut être hâtif ou réfléchi, simple ou complexe, sévère ou nuancé, émotionnel ou raisonné… En fait, il revêt nombre de formes et d’aspects. Qu’il soit fondé ou non, il n’en reste pas moins encombrant la majeure partie du temps.

 

Alors quels sont les jugements qui ont du sens, qui se justifient, et ceux qui sont malvenus, qui créent de la souffrance ?

 

Les différents jugements

 

  • Ceux qui catégorisent en bien ou mal ; ces jugements se traduisent souvent par une forme d’injonction de ce qui doit être, ou de ce qu’il faut faire, comme si nous étions tous d’accord sur ce qui est bien ou mal. Ces jugements sont plus complexes qu’ils n’y paraissent et résultent de l’histoire, de la culture, de la sociologie, de l’époque…

 

  • Ceux qui expriment un avis ; ces jugements expriment notre subjectivité, ils commencent par « JE » >>> je pense, je crois, je suppose, je trouve que… Cette façon de juger, d’évaluer, d’apprécier et de prendre position se limite à notre personne, Ainsi nous ne tentons pas de décrire une quelconque réalité, mais uniquement notre vision/perception.

 

  • Ceux qui définissent une personne, un objet, une situation ; ces jugements ont tendance à limiter (cadrer), généralement constitués d’adjectifs qualificatifs, ils vont déterminer/définir.

 

 

La Dichotomie du monde

 

Le monde est composé de toute chose et de son opposé : le haut et le bas, la droite et la gauche, le bien et le mal, la guerre et la paix, l’ombre et la lumière, l’homme et la femme… Et si nous comprenons que nous ne saurions pas ce qu’est la lumière sans l’ombre, ou ce qu’est l’ombre sans la lumière, alors peut être pouvons-nous donner un sens à ce qui est.

 

Nous avons l’habitude de catégoriser la guerre, la maladie, la misère, la famine, la mort et tant d’autres choses de « mal. »

 

Mais la vie aurait-elle la même saveur, la même valeur si elle était éternelle ? Déjà qu’en sachant qu’elle a une fin, nous ne lui faisons pas toujours honneur, nous ne la vivons pas toujours pleinement. Mais si elle était éternelle qu’en ferions-nous ?

 

La maladie nous sert à vouloir être en bonne santé, cela nous pousse à prendre soin de nous, à faire attention, à donner de la valeur à notre bien être physique et psychique.

 

Souhaiterions-nous vivre en paix, si nous ne jugions pas la guerre comme néfaste ? Mais pour la juger néfaste, il faut savoir ce que c’est. Pour apprécier la paix, il faut connaître la guerre.

 

Ainsi à la question pourquoi le monde est-il si cruel ? Pourquoi le monde-est-il si injuste ? Ou pourquoi le monde produit-il de la souffrance ? La réponse est toujours la même : le monde est autant généreux, bon et beau, que cruel, autant juste qu’injuste, ou plutôt ni juste, ni injuste. Et il produit de la souffrance, parce qu’il produit également de grands bonheurs, des bonheurs que nous ne saurions apprécier si nous ne savions pas ce qu’est la souffrance.

 

Nous appelons cette observation « Dichotomie du monde »; c’est à dire qu’à la fois il existe un jugement en ce monde de par les paires de toute chose et à la fois il n’existe aucun jugement en ce monde, parce que si nous le regardons dans son ensemble tout est parfaitement à sa place, avec sa raison d’être.

 

Origine et rôle de la souffrance

 

Personne n’aime souffrir, pourtant pour comprendre la souffrance, il faut l’avoir subi. Et parfois en faire l’expérience ne suffit pas pour la connaître et la comprendre. Parce que pour la connaître et la comprendre, il faut savoir écouter ce qu’elle dit. On pense que la souffrance n’est que douleur, malheur, mais elle est avant tout une information. Une information ni bonne, ni mauvaise, dont le seul but est d’informer. Informer qu’il y a quelque chose en nous qui n’est pas accueilli, entendu, reconnu, pas par l’autre, mais par nous. Dès que l’information est reçue, la souffrance cesse aussitôt.

 

Bien sûr je ne parle pas de souffrances physiques, telle une blessure qui nécessite du temps pour cicatriser et guérir. Je parle de nos blessures intérieures, ces blessures invisibles pour l’œil seul, qui si elles ne crient pas en nous, pour nous alerter que quelque chose ne va pas, finissent par pourrir et nous détruire intérieurement sans qu’on s’aperçoive.

 

Quels messages nos souffrances portent-elles ? La majeure partie du temps, elles portent nos jugements, et plus précisément nos jugements négatifs, c’est à dire ce que l’on n’accepte pas, ce que l’on rejette, ce que l’on nie, ce contre quoi on résiste….

 

Le jour où l’on commence à entendre nos jugements négatifs, à les accueillir, les accepter, la souffrance disparaît parce que l’on prend conscience de ce qui est : nous, nos jugements, ce que l’on croit, cultive, crée, qui ne dépend que de nous, qui est de notre responsabilité.

 

  • Les jugements, catégorisant ce qui est bien ou mal, peuvent exercer une pression sociale qui impactera notre comportement si nous leur accordons de l’importance, tout en étant incapable de nous y conformer. L’issue consistera soit à cesser de leur accorder de la valeur et à assumer de ne pas s’y conformer, soit à respecter la valeur accordée et changer notre comportement.

 

  • Les jugements émanant de l’opinion d’une personne, peuvent nous donner le sentiment d’être peu apprécié, d’avoir peu de valeur, si nous manquons d’estime de soi et que nous recherchons l’approbation extérieure. Pourtant ils ne parlent pas de nous, mais de ce que pense l’autre. Bien sûr nous pouvons être déçus de la façon dont on est perçu, mais le plus constructif ne sera pas de souffrir. Il s’agira plutôt de comprendre pourquoi l’autre nous juge ainsi, et d’entendre ce que nous en pensons nous-même. Encore une fois si nous adhérons, l’issue sera de changer, mais dans le cas contraire, il s’agira de faire preuve de tolérance et d’ouverture face à l’opinion d’autrui.

 

  • Les jugements qui nous définissent, n’ont de valeur que si nous sommes d’accord. Si nous sommes d’accord, il nous faudra faire preuve de cohérence/congruence pour ne pas souffrir. Et si nous n’adhérons pas, ils ne devraient pas nous atteindre, puisque nous ne leur accorderons pas de valeur. Même si nous n’accordons pas de valeur au contenu, nous pouvons accorder de l’importance à la forme. Cette forme d’expression est gratuite, violente, brutale, encore une fois cela ne parle pas de nous, mais de l’autre et de son incapacité à mesurer ce qu’il est entrain de dire et de faire. Ce type de jugements peut être blessant par son contenu, et/ou nous mettre en colère de part sa forme. Seule la conscience de soi permettra de gérer calmement ce genre de situation. Sans maîtrise de soi, mieux vaut se retirer, parce qu’il ne sera pas possible d’échanger calmement et clairement en cas de blessure et/ou de colère. 

 

Les jugements extérieurs n’ont de pouvoir qu’à la condition qu’ils existent en soi. Si lorsqu’une souffrance se manifeste, vous acceptez de la ressentir, de vous y confronter, de la vivre, afin d’entrer en relation avec elle, et de l’écouter, pour entendre son message. Alors vous pourrez prendre conscience de vos jugements, et vous pourrez agir pour ne plus souffrir.

 

Juger c’est mal

 

Je conclurai sur le « juger c’est mal ». Le mot -juger- est plutôt classé négativement, comme si juger était automatiquement pour juger mal. Pourtant quand on est complimenté et critiqué positivement, il s’agit aussi de jugements. Aussi juger n’est ni bien, ni mal.

 

Si nous n’étions pas en capacité de juger les choses, les gens, les situations, nous mettrions sans doute notre vie davantage en danger que nous ne le faisons déjà. Hors être en capacité de se protéger et de discerner est un atout précieux pour naviguer dans les aléas de la vie. Le souci n’est jamais de juger mais de savoir ce que nous en faisons ; est-ce que cela nous entrave ? Est-ce que nous déposons nos jugements chez autrui ? Est-ce que nous nous en servons positivement ou négativement ? Et n’oublions jamais que nos jugements ne parlent pas de l’objet jugé mais avant tout, et uniquement de nous.

 

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