La Gestion Emotionnelle

La gestion émotionnelle, ou « gérer ses émotions », n’est pas « contrôler nos émotions », dans la mesure où l’on ne peut pas éviter d’avoir des émotions, et choisir l’émotion que l’on souhaite au moment où on le souhaite. Il s’agit davantage d’un accueil, d’une mise en contact/en lien avec elles, et la notion de gestion intervient dans le quoi faire de nos émotions, leur expression, et non dans leur manifestation intérieure. Si l’on ne peut contrôler nos émotions, il arrive qu’elles nous contrôlent, et la gestion émotionnelle a pour but de ne plus être dominé par nos émotions, de ne pas être dirigé par elles.

 

La gestion émotionnelle c’est apprendre à développer suffisamment de distance, mais une distance « juste » entre nos émotions et nous, pour à la fois les voir venir, pouvoir les observer, échanger avec elles, et découvrir ce qu’elles disent de nous.

 

Il faut être suffisamment près d’elles pour pouvoir les identifier, les reconnaître, les sentir, mais pas trop près non plus, pour ne pas être submergé, envahi, débordé…

 

Sommes-nous conscient d’être dirigé par nos émotions ?

 

Subir nos émotions, c’est quand nous agissons sous le coup de l’émotion, et qu’après coup, nous regrettons nos mots, ou nos actes, parce qu’ils ont dépassé nos pensées, parce que ce n’était pas ce qu’on voulait vraiment, parce que les conséquences ne sont pas celles que l’on souhaitait…. Nous pourrions résumer tout cela à la notion de « regrets ». Avoir parlé ou agi trop vite, sous le coup de la pulsion émotionnelle, qui fera de nous un être « impulsif » qui ne se maitrise pas, qui est dirigé par ses émotions…

 

Ainsi comme les émotions sont globalement rejetées dans l’espace public, on nous apprend dès le plus jeune âge à limiter l’expression de ces dernières, supposant à tort que les taire et les éliminer de tout caractère expressif, s’appelle « gérer nos émotions ».

 

Rendre invisible quelque chose ne l’élimine pas pour autant. Ainsi, ce n’est pas parce qu’on ne parle pas de nos émotions, qu’on ne les montre pas, qu’on les étouffe, qu’elles n’existent pas. Si l’impulsion émotionnelle est peu ou pas tolérée en société, et que l’évitement est recommandé, elle ne reflète en rien la capacité à gérer nos émotions. Le déni émotionnel qui nous est majoritairement enseigné en occident n’est pas l’expression de la gestion émotionnelle, mais celle d’une non-gestion émotionnelle.

 

La non-gestion émotionnelle consiste en 2 options :

 

  • – celle d’être trop près de nos émotions, ce qui a pour conséquence d’être envahi, débordé, contrôlé par nos émotions ; nous n’avons pas la capacité à nous dominer, à garder notre sang-froid, nous agissons sans réfléchir, réactions impulsives, nous pouvons être des éponges, sensibles et imprégnées de tout et par tout.

 

  • – celle d’être trop loin, ce qui a pour a conséquence de ne pas les voir, les sentir, de ne plus être en contact et en lien avec elles ; nous semblons nous dominer, mais il n’y a rien à dominer quand on ne sent rien, pas un mot plus haut que l’autre, peu ou pas d’expressivités en général, grand sang-froid, manque d’empathie et de compréhension émotionnelle, forme d’indifférence, réactions mécaniques et ordonnées, perception des émotions d’un point de vue théorique….

 

La gestion émotionnelle c’est le juste milieu entre les 2 extrêmes de la non-gestion émotionnelle. C’est ne pas être trop près, et ne pas être trop loin de nos émotions. Prenons la métaphore de la nourriture, un plat qui se mange chaud aura moins de saveurs s’il est froid, ou s’il est trop chaud, dans les 2 cas notre capacité à apprécier le plat est optimisée à la « bonne » température. Le trop froid (trop de distance) anesthésie nos papilles, le trop chaud (pas assez de distance) brûlera nos papilles. Le phénomène émotionnel est le même que celui de nos papilles, trop de distance avec nos émotions nous anesthésie, on ne sent plus rien, pas assez de distance avec nos émotions nous consumera de l’intérieur, et lorsqu’on est brûlé au 4ème degré ça fait mal, ça fait de nous des plaies ouvertes, sensibles et irritables….

 

Alors si l’on comprend bien désormais ce qu’est la gestion émotionnelle et à quoi elle sert ; elle sert à être pleinement humain, des êtres d’émotions, en lien avec elles, sans les subir, ni y être soumis. Comment gérer nos émotions ? Comment les sentir avec la « bonne » distance pour qu’elles nous servent, sans nous asservir, sans nous desservir ?

 

L’apprentissage de la gestion émotionnelle se fera en plusieurs étapes :

  • 1. Se mettre à la « bonne » distance
  • 2. Entrer en contact / Reconnaître
  • 3. Comprendre
  • 4. Agir

 

1. Se mettre à la « bonne » distance

 

Je vous conseillerai l’apprentissage de la respiration profonde, par la méditation en pleine conscience, ou par le yoga. Choisir des activités qui développent l’observation des sensations, il peut s’agir d’un sport où l’objectif sera d’investir le corps par l’écoute de soi et non la performance. Par exemple, nager pour développer sa résistance cardiaque, ou nager pour démultiplier la dimension sensorielle ne s’exécutera pas de la même façon, ainsi il est possible de choisir une activité familière, si on l’adapte à un nouvel objectif, en modifiant notre approche et notre pratique. Se faire masser peut être également une occasion d’investissement du corps, pour développer notre écoute intérieure.

 

  • – Pour ceux qui souhaitent prendre de la distance, apprendre à investir le corps, en dehors des pulsions émotionnelles, vous fortifiera dans l’accueil de ces dernières lorsqu’elles se présenteront à vous. C’est à dire qu’au lieu d’être en mode pulsion/réaction, vous passerez en mode accueil/stop, parce que vous aurez développé votre capacité d’accueil émotionnel, dans le but de mieux les appréhender. Lorsque l’émotion déborde, bouillonne en vous, respirer profondément, se concentrer sur notre respiration, sentir le souffle entrer, circuler et sortir est ce qui nous permettra de se distancier. Cela n’efface ou n’élimine pas l’émotion, mais cela permet de la temporiser. Vous savez c’est comme regardez un tableau, si vous avez le nez dessus, il est peu probable que vous profitiez pleinement de sa beauté, par contre en reculant de quelque pas, en vous mettant à la « bonne » distance vous commencerez à le voir en entier, dans sa plus belle expression. Votre émotion c’est comme un tableau, la respiration c’est la marche qui vous permet de reculer jusqu’à être à la « bonne distance ».

 

  • – Pour ceux qui souhaitent réduire la distance, apprendre à investir votre corps vous permettra de reprendre contact avec le ressenti physique sensoriel et émotionnel. C’est une forme de rééducation, il ne s’agit plus de percevoir en fonction d’une analyse mentale (A+B=C) mais de réaliser que dans le domaine émotionnel, il y a peu de règles, peu de logiques, aucune rationalité, et par conséquent peu de contrôle et beaucoup d’imprévisibilités. Entrer dans le monde du vivant, des vivants, peut être effrayant parce que tous nos repères risquent de s’effondrer mais il n’est pas possible d’être en lien « réel » avec le monde extérieur, sans être soi-même relié à son monde intérieur. Et le monde intérieur dont je parle ici, n’est pas le mental, et les histoires qui moulinent dans le cerveau, mais ce qui se vit profondément en vous que vous ne sentez plus, tellement que c’est loin depuis si longtemps…

 

2. Entrer en contact / Reconnaître

 

Une fois que nous sommes à la « bonne » distance de nos émotions, en capacité de les sentir et de les regarder, il s’agit d’entrer en contact avec elles. Qui est-elle ? Est-elle une ou multiple ?

 

Déterminer nos émotions, c’est les reconnaître en nous ; elles se nomment : joie, peur, colère, dégout, surprise, tristesse. Et elles peuvent être multiples soit par superposition comme un oignon, constitué de plusieurs couches, soit par parallélisme, elles cohabitent les unes à côté des autres sans se confondre.

 

3. Comprendre

 

Nos émotions ont un/des sens. Si elles se manifestent c’est qu’elles ont une raison d’être. Elles sont des guides, des panneaux indicateurs, des sources d’informations de là où nous sommes, pour décider où aller. La tristesse parle de nos blessures ; La colère, de nos limites ; Le dégoût, de nos aversions ; La peur, de nos envies ; La surprise, de nos croyances ; La joie, de nos satisfactions. Ainsi quand l’une de ces émotions s’exprime, il paraît intéressant de se demander qu’est-ce qui est touché en nous.

 

  • – Tristesse : « je me sens abandonné »
  • – Colère : « je ne me sens pas respecté »
  • – Dégout : « je suis répugné par… »
  • – Peur : « je crains de… »
  • – Surprise : « je ne m’y attendais pas »
  • – Joie : « je suis content de… »

 

4. Agir

 

Agir ou ne pas agir en réalité, puisque ne pas agir est aussi une action.

 

Pour ceux qui ont déjà observé leur réaction, vous aurez sans doute constaté que nos réactions ne sont pas toujours en adéquation avec nos émotions et nos besoins.

 

Par exemple : lorsqu’on a de la peine, il serait naturel de pleurer et d’avoir besoin de réconfort, d’être pris dans les bras, d’être câliné et de trouver du réconfort…

 

Pourtant ce type de réactions n’est pas toujours ce que l’on rencontre ; quelqu’un qui a de la peine pourra sembler indifférent, assommé, en colère, et même faire bonne figure. Et toute la question est là, ne pas exprimer sa tristesse, voire la masquer, est-il un choix conscient et délibéré ou est-ce automatique et ré/actionnel ?

 

Si notre but est de cultiver la joie, et donc la satisfaction de Soi, un des moyens d’y parvenir est le respect/amour de Soi et cela passe par la cohérence/congruence.

 

Si nous avons besoin de réconfort parce que nous sommes tristes, le bon sens est de se tourner vers quelqu’un qui est apte à nous en apporter. Mais si nos premières expériences de tristesse n’ont pas été accueillies et reconnues par nos parents, il est probable que nous ayons enregistré que pleurer ne sert à rien, qu’avoir besoin de câlins n’est pas envisageable et que dans ce contexte, mieux vaut taire sa tristesse. Et c’est ainsi qu’à force de vivre encore et encore le rejet émotionnel, pour survivre, on s’éloigne de plus en plus de Soi afin de répondre à l’exigence de l’environnement. L’être humain est assez extraordinaire parce qu’on peut l’entrainer/l’habituer à tout, pour peu qu’il s’agisse de survie.

 

Suite à de telles expériences, nous deviendrons un adulte qui ne fait que répéter (re/action) ce qu’il a appris, ce qu’il sait faire.

 

Le problème de la réaction c’est qu’elle ne répond pas à notre besoin, mais à celui de l’extérieur. C’est pour ça que la réaction est souvent incohérente et dissonante avec notre besoin, et donc notre volonté, c’est parce qu’elle n’est pas l’expression de ce que nous sommes, mais de ce que l’on attendait de nous. Elle n’est pas dirigée de l’intérieur vers l’extérieur, mais de l’extérieur vers l’intérieur. Et Être Soi, se respecter, s’aimer c’est émettre de soi vers les autres et non l’inverse.

 

C’est là que la gestion émotionnelle prend tout son sens, elle nous permet de reprendre notre vie en main. D’apprendre à accueillir, nommer, ce que l’on ne nous a pas appris.

 

La distance émotionnelle qui nous remet en lien avec soi sert à agir et non à ré/agir.

 

Et agir pour quoi faire ? Pour enfin choisir les actions qui seront cohérentes avec notre être, nos besoins, notre volonté.

 

En réalité, les émotions sont l’opposé de ce que la société nous fait croire.

 

Elles ne sont pas négatives, elles sont positives, elles ne sont pas des freins, mais des moteurs, elles ne sont pas encombrantes, mais libératrices. En fait, elles ne sont négatives, des freins, et encombrantes que lorsqu’elles ne sont pas reconnues, parce qu’elles gangrènent à l’intérieur, pourrissant notre corps, notre cœur et notre esprit…. Elles nous rendent malade (mal/a/die).

 

Alors Agir ce peut être toutes sortes d’actions ; Ce peut être simplement laisser circuler l’émotion, discuter avec elle, lui apporter les mots dont elle a besoin, ce peut être dirigé une action vers un objet, un lieu, une personne, ce peut être tout et n’importe quoi à la seule condition que cela soit en accord avec soi-même.

 

Si l’action que nous choisissons est en accord avec Soi, elle nourrira notre estime de soi, notre confiance en soi, elle nous permettra de tenir debout, fier d’avoir agi dans le sens que nous souhaitions. Donner du sens à ce que nous vivons, diriger nos actions dans le sens choisi est très satisfaisant « JOIE » !

 

Aucun regret ne viendra nous hanter, aucune culpabilité ne nous rongera, parce que les regrets, la culpabilité ne naissent que de nos dissonances et du manque de respect de Soi.

 

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